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La concept de nature selon saint Thomas d'Aquin. Actes du Colloque. Toulouse, 28-29 mai 2021
D. Perrin: Ars imitatur naturam
reception et interpretation thomasiennes de l'adage C'est a la reception et a l'interpretation de l'adage aristotelicien
ars imitatur naturam (
Physique, II, 2, 194 a 20-25) que cette etude est consacree. Saint Thomas affirme, comme Aristote, que l'art imite la nature mais sa maniere de comprendre la raison de cette imitation ou de cette ressemblance n'est pas exactement celle du Philosophe car c'est, pour lui, une seule et meme Intelligence divine qui est au principe des
naturalia et des
artificialia 1) des
naturalia car celles-ci ont ete formees a partir des idees divines, 2) des
artificialia car l'intelligence humaine qui les produit est une certaine participation de l'intelligence divine. Comme Aristote, saint Thomas soutient que l'art accomplit ce que la nature ne peut pas faire mais les nombreuses manieres d'entendre cet accomplissement le menent egalement plus loin que son maitre. Saint Thomas envisage l'art comme un accomplissement par l'homme de sa propre nature, une suppleance possible aux defauts de la nature et une aide apportee a la nature dans certains cas pour realiser ses propres fins. Quand saint Thomas, enfin, soutient que la nature est l'oeuvre de l'art de Dieu, et par appropriation, l'oeuvre du Verbe,
l'art du Pere , la doctrine de l'imitation de la nature par l'art humain devient, indirectement, une imitation de l'art divin a l'oeuvre de la nature. La theologie trinitaire de la Creation vient bouleverser l'interpretation de l'adage et lui donner une portee qu'Aristote n'avait fait qu'entrevoir. L'equilibre que saint Thomas tient entre une doctrine totalement exemplariste, comme celle de Platon, et une doctrine de la creativite, comme celle de Nicolas de Cues, lui donne de penser, pour de bon, l'inventivite artistique et la production de formes neuves, sans faire pour autant de l'activite artistique une activite creatrice.
F. Daguet: La nature politique chez saint Thomas d'Aquin La nature politique est une realite bien etablie chez Thomas, aussi bien lorsqu'il etudie les hommes et les communautes humaines que lorsqu'il traite du genre humain dans son ensemble a la lumiere de la Revelation. Pour autant, ces deux domaines paraissent chez lui comme juxtaposes, et il n'est pas sans interet de voir comment ils peuvent se rejoindre, des lors qu'il s'agit des memes hommes et des memes groupes humains, apprehendes a la fois par la raison naturelle et par la foi theologale.
A. Seriaux: Apories thomasiennes sur le droit naturel Thomas d'Aquin traite specifiquement du droit et du droit naturel a l'occasion de son expose sur la vertu de justice (
Somme de theologie,
IIa-IIae, q. 57). Il le fait principalement en reference a Aristote, dont il vient de commenter l'
Ethique a Nicomaque, mais il sait aussi puiser son inspiration chez les juristes romains, Ulpien notamment. Cette heureuse synthese ne laisse pas, toutefois, d'etre ambigue. Quel rapport entretient-elle, en particulier, avec le traite des lois (
Ia-IIae, q. 90 s.) ? D'un cote, Thomas se refuse a confondre droit et loi, mais d'un autre cote, il ne cesse de les rapprocher. De meme, s'il fait reposer le droit naturel sur la
nature des choses (ce qui parait l'eloigner d'autant de la loi naturelle, qui decoule quant a elle de la
nature humaine ), il considere neanmoins que le droit naturel change parce que la nature humaine est sujette au changement et que
tout ce que la raison dicte a l'homme est de droit naturel . C'est a l'elucidation de telles apories que cet article est consacre.
Ph.-M. Margelidon: Bonum naturae, peccatum naturae et malum naturae
dans la Summa theologiae
et le De malo
de saint Thomas d'Aquin Le vocabulaire de la nature est paradoxal. Il y a un bien de nature (
bonum naturae), comme il y a un mal de nature (
malum naturae): un bien de nature avant le peche et un bien de nature apres le peche, comme il y a un mal de nature avec le peche de nature. La nature humaine est a la fois le sujet d'un bien, mais aussi d'un double mal, de coulpe et de peine: le peche de nature (
peccatum naturae) et la mort qui est a la fois
secundum naturam et
contra naturam. On peut parler d'un double etat paradoxal de la nature humaine dans l'histoire du salut chez saint Thomas d'Aquin.
F.-X. Putallaz: Le concept de nature selon Georges Cottier Historien de la philosophie moderne, Directeur de la revue
Nova et Vetera et Theologien de la Maison pontificale, le Cardinal Georges Cottier, o.p. (1922-2016), a laisse deux etudes de premiere importance sur la notion de nature. Il y insiste sur la polysemie du terme: donnee premiere de l'experience humaine, la nature comporte une richesse que l'histoire de la philosophie a eu tendance a perdre de vue, au point qu'on en arrive a une opposition irreductible entre
nature et
liberte , rendant inintelligible le role de la loi naturelle. L'enjeu consiste donc aujourd'hui a redonner a la nature toute son ampleur. On y decouvrira comment la multiplicite des sens du terme rejaillit sur la diversite de la grace qui perfectionne la nature humaine en particulier.
M. Node-Langlois: La redecouverte de la cause formelle chez Kant: une occasion manquee ? Dans sa
Critique de la faculte de juger (1790), Emmanuel Kant rehabilite les concepts majeurs de la physique aristotelicienne, a l'encontre du mecanicisme classique, qu'il avait pourtant lui-meme voulu consacrer dans la
Critique de la raison pure (1781). Si la notion de finalite naturelle se trouve ainsi restauree dans son veritable sens, il n'en va pas de meme de la notion de cause formelle, que Kant presente comme une force, a l'instar d'auteurs critiques en son temps par Thomas d'Aquin.
L. Solignac: La nature dans la pensee de saint Bonaventure ou la physique du salut La nature souffre-t-elle d'un manque de consistance dans la pensee bonaventurienne ? Enracinee dans la theologie trinitaire et definie par sa communicabilite, la notion de nature trouve dans la
creature du monde un lieu d'expression qui manifeste a la fois la solide structure trinitaire de toute nature et sa vigueur, dont l'activite reguliere constitue le
cours habituel des choses (saint Augustin). Aussi la physique, y compris dans ses developpements aristoteliciens, s'integre naturellement a l'edifice de la sagesse chretienne, comme science qui a pour objet la nature comme dynamisme et pour mystere lumineux ou medium
le corps mobile du Christ en son incarnation.