About the Book
I.-L'ÉDUCATION ORATOIRE DE MIRABEAU Nul homme ne fut peut-être mieux préparé que Mirabeau à la carrière oratoire. Ces conditions de savoir universel réclamées par les anciens, il les remplissait mieux que personne en 1789. Sa lecture était prodigieuse, grâce aux longues années qu'il avait passées en prison. Ni au château d'If, ni au fort de Joux, ni au donjon de Vincennes, les livres ne lui furent interdits. Il en demande et en obtient de toutes sortes: romans, histoire, journaux, pamphlets, traités de géométrie, de physique, de mathématiques affluent dans sa cellule, et, si on tente de les lui refuser, son éloquence irrésistible séduit et conquiert geôliers et gardiens. Loin d'être isolé, par sa captivité, du mouvement des idées, il reste en contact quotidien avec le développement intellectuel de son époque. C'est peu de lire: il prend des notes, fait des extraits, envoie chaque jour à Sophie un journal où ses impressions de lecteur tiennent autant de place que ses effusions d'amoureux, commente et traduit Tacite, compose son Essai sur les lettres de cachet et sur les prisons d'État, un essai sur la Tolérance, et, pour l'éducation de l'enfant que va lui donner sa maîtresse, une mythologie, une grammaire française, un cours de littérature ancienne et moderne; enfin, pour décider Sophie à vacciner cet enfant, un traité de l'inoculation. Ce ne sont là que ses griffonnages de prisonnier. Les livres qu'il publie attestent une diversité d'études plus grande encore: le commerce, la finance, les eaux de Paris, le magnétisme, l'agiotage, Bicètre, l'économie politique, la statistique, il n'est aucun sujet à la mode à la fin du XVIIIe siècle, même la littérature obscène, qu'il n'ait abordé et qu'il n'ait traité avec éclat, scandale, succès. Il n'ignorait rien de ce qui intéressait ses contemporains et ce qu'il avait appris, il se l'assimilait assez vite pour paraître l'avoir su de naissance.
About the Author: Alphonse Aulard, né François-Victor-Alphonse Aulard le 19 juillet 1849 à Montbron, mort le 23 octobre 1928 (à 79 ans) à Paris, est un historien français, titulaire de la première chaire d'histoire de la Révolution française à la Sorbonne, à partir de 1885 et jusqu'en 1922. Il est un des premiers historiens de la Révolution à s'appuyer sur des véritables recherches archivistiques, avec un corpus scientifiquement confirmé. Il est par ailleurs un radical-socialiste et un franc-maçon militant, et cofonde la Ligue des droits de l'homme. Alphonse Aulard appréhende Danton comme la figure majeure de la Révolution. Il revient plus tard sur cette idée, notamment lors de l'écriture de son livre Histoire politique de la Révolution française, et de son refus d'être présent lors de la cérémonie d'inauguration de la statue de Danton. Mais son approche historique proche du mouvement positiviste lui attire les foudres de son ancien élève, Albert Mathiez, en 1908, lors de son compte rendu sur Hippolyte Taine, historien de la Révolution française. Éditeur de nombreuses archives de la période révolutionnaire, ses 27 volumes du Recueil des Actes du Comité de salut public (1889-1933), ses six volumes de La société des Jacobins: recueil de documents pour l'histoire du Club des jacobins de Paris (1889-1897) et ses quatre volumes du Paris sous le Consulat, recueil de documents pour l'histoire de l'esprit public à Paris (1903-1913) sont une mine d'informations pour toute personne désireuse d'appréhender cette période historique. Dépité et déçu par la République conservatrice qui s'installe durablement dans les années 1880, il déclare au journaliste Édouard Durranc à l'été 1885 Ah ! Que la République était belle sous l'Empire !