About the Book
1 André Durand présente Jean ANOUILH (France) ( ) Au fil de sa biographie s inscrivent ses oeuvres qui sont résumées et commentées (surtout Antigone, Becket ou l honneur de Dieu qui sont étudiés dans des dossiers à part). Bonne lecture! 12 Il est né à Cérisole, près de Bordeaux, d un père, François, qui était tailleur et d une mère, Marie- Magdeleine Soulue, qui était une musicienne qui jouait du violon dans un orchestre itinérant et était professeuse de piano. Comme l orchestre se produisait sur des scènes de casinos en province (en particulier, celui d Arcachon) il fut, dès sa plus tendre enfance, sensibilisé à la scène et au phénomène du spectacle. Mais, comme, au premier entracte, on l envoyait se coucher, il terminait mentalement les pièces avant de s endormir. Plus tard, lorsqu il vit les vrais dénouements, il fut souvent fort déçu. Très tôt pris de passion pour le théâtre, de douze à seize ans, il écrivit de fausses pièces et découvrit les grands auteurs classiques: Molière, Marivaux et Musset, mille fois relus. La famile étant venue s établir à Paris, il entra à l école primaire Colbert puis au Collège Chaptal (où il eut comme condisciple Jean-Louis Barrault, et lut Claudel, Pirandello et Shaw). Traînant des heures sur la butte Montmartre avec un camarade, il passa son baccalauréat sans conviction. Sa grande passion étant le théâtre, il rêvait de vivre dans une troupe et hantait la Comédie des Champs-Élysées, dirigée par Louis Jouvet. Au printemps de 1928, il y assista à la représentation de Siegfried de Jean Giraudoux, qui l éblouit: C'est le soir de Siegfried que j'ai compris. Je devais entrer par la suite dans une longue nuit, dont je ne suis pas encore sorti, dont je ne sortirai peut-être jamais, mais c'est à cause de ces soirs du printemps 1928, où je pleurais, seul spectateur, même aux mots drôles, que j'ai pu m'évader un peu. La pièce lui apprit qu on pouvait avoir au théâtre une langue poétique et artificielle qui demeure plus vraie que la conversation sténographique. Mais, sa timidité étant maladive, il n osa pas aborder l auteur qui allait rester l'un de ses maîtres. Il eut une autre révélation à la lecture de la pièce de Cocteau, Les mariés de la tour Eiffel, qui fut un autre texte fondateur pour son oeuvre. Pourtant, il fallait vivre. Il passa un an et demi à la faculté de droit de la Sorbonne, mais abandonna ses études, sans avoir obtenu de diplôme, pour des raisons matérielles (Je me suis dit que je ne pouvais laisser mon père se crever à me payer des études). Puis il travailla deux ans dans une maison de publicité, où il rencontra Jacques Prévert et où, a-t-il dit: J ai pris des leçons de précision et d'ingéniosité qui m ont tenu lieu d'études poétiques, tout en inventant des gags pour des films. Il fit le choix de vivre pour et par le théâtre et écrivit: Humulus le muet (1929) Comédie Humulus est un homonculus (petit homme) muet mais à qui, dit la duchesse, un médecin anglais, à force de soins, est arrivé à faire prononcer un mot par jour [ ] En grandissant, nous espérons qu il pourra en dire davantage [ ] Si mon petit Humulus s abstient un jour de prononcer son mot, il peut en prononcer deux le lendemain. Humulus tombe amoureux d'hélène et reste silencieux un mois pour faire un stock de mots. Puis il élabore une déclaration en règle ne dépassant pas les trente mots qu'il claironne dans un glorieux effort. À la fin, la belle Hélène sort de son sac un énorme cornet acoustique et dit gentiment: Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît? Un destin malicieux les avait amenés, pour ainsi dire, à diviser le travail: il est muet et elle est sourde! Ce lever de rideau, écrit en collaboration avec Jean Aurenche, procéda d une idée farfelue poussée dans ses derniers retranchements. Cette brève farce ne tirait pas à conséquences, mais elle recelait le germe du théâtre d'anouilh avec se